« Le monde est fait de sucre et de poussière. » [~ Maika]

« Le monde est fait de sucre et de poussière. » de Alfred Döblin ~

- Hey, ça fait un moment qu'on a pas vu Haya.
- Depuis que Lucas l'a largué, en fait.

Des ricanements s'élèvent dans l'air, tandis que le blondinet recrache la fumée de sa cigarette, un air perplexe au visage. C'était laquelle déjà, Haya ? Ah, la petite blonde. Non, non, elle c'était Chika. Alors, la fille avec les yeux gris ? Non, elle, son prénom commençait par un M. Mais alors qui était Haya ? Lucas passa une main dans ses cheveux, puis sourit au groupe de filles adossées au mur, en face de lui, avant de se relever. Il fit quelques pas titubant - combien de temps était-il resté assis ? - puis sortit du Paradis Drogué, le couloir exclusivement réservé aux Lovely et aux Popular. Il écrasa la fin de sa cigarette sous sa botte avant de sortir une sucette de sa poche et de la porter à sa bouche.

Aujourd'hui, il avait envie de se promener dans le pensionnat, de se dénicher une jolie fille et peut-être plus si affinités, quoi. Il passa devant une vitre, et s'arrêta pour observer son reflet. Il avait remis son chapeau, prêt à l'enlever si un surveillant ou un professeur lui demandait, mais bref. En-dessous de ça, ses cheveux blonds, tombant jusque dans son cou, laissant apercevoir une oreille percée de quatre trous, dont trois cartilages. Une chemise blanche avec une cravate rouge peu serrée, un pantacourt noir et des bottes blanches. Voyant. Sans oublier le vernis noir à ses ongles. Encore plus. Après ce court instant, il recommença à déambuler dans les couloirs.

Il suscita des regards désapprobateurs du côté de quelques Intellectual's, ravit certaines Athletic's, fut quasiment adulé par une troupe de Lovely, tandis que deux gamines de Musican's vinrent l'aborder. Ces deux filles là, il les connaissaient bien. Elles étaient en première année, et avaient des mentalités vraiment très enfantines. Lucas les aimaient bien, et il n'y avait qu'avec elles qu'il se montrait réellement gentil. Le jeu favori de ces demoiselles était un jeu de carte, avec, comme mise, un paquet de bonbons. Il les accueillit dans ses bras, tombant à la renverse lorsqu'elles se jetèrent sur lui. Quelques personnes vinrent l'aider à se relever, et il les chassa gentimment lorsqu'il fut debout.

- Vous allez bien les filles ?
- Lucas, faut que tu viennes ! L'heure est grave !
- Y a une fille, elle est trop forte. Elle a vu les bonbons, et elle gagne depuis tout à l'heure pour tous les récupérer !
- Ah oui ? Allons-y, dans ce cas.

"Allons-y", voulait dire "Allons tous au premier gymnase". En effet, certaines heures, il n'était pas accaparé par des Athlétic's transpirants, mais par des jeunes qui venaient se disputer des friandises. Il toisa la plupart des personnes présentes, avant de se placer face à la table de jeu. Il fixa son adversaire, la jaugeant du regard. Cheveux verts, yeux verts. Pas bien grande, mais pas petite non plus. Mignonne. Sûrement une Lovely. Il ne se souvenait pas pourtant de l'avoir déjà vu au Paradis Drogué. Il pencha sa tête sur le côté, ses lèvres s'étirant sur un sourire malsain.

- T'as pas de chance, je suis accro aux bonbons et j'en ai plus beaucoup en ce moment. Je vais gagner.

Il attrapa les cartes, les distribua. En cacha deux dans sa manche, subtilement, comme il le faisait toujours. Non, il ne trichait pas. Il influençait le destin.

- Le but du jeu, c'est de se débarrasser de ses cartes. Quand tu as une paire, tu peux la poser. Quand tu n'en a plus dans ta main, tu pioches. C'est aussi simple que ça. Le premier qui se défausse de toutes ses cartes gagne la partie. Ah, mais tu le sais, puisqu'apparemment tu viens de gagner contre tous les autres ...

Il regarda son tirage, parmi ses 10 cartes. 2 paires, 3 avec une des cartes qu'il avait gardé dans sa manche. Nickel.

- J'ai 3 paires.

Puis il piocha une carte. Hum, décidemment, la chance ne semblait pas décidée à lui sourire. Il avait tiré une carte inutile. Il attendit le tour de la demoiselle.

- Au fait, je m'appelle Lucas. Tu as peut-être déjà entendu mon nom circuler dans le pensionnat ...

Petit sourire charmeur. Quelques filles dans l'assistance se mirent à glousser tandis que les garçons suivaient le jeu, intensément.

-Mai, regarde celui-là, je le trouve trop canon, pas toi?

Maika regarda dans la direction que lui indiquait sa partenaire de solfège, un garçon brun-roux coiffé à la végéta avec des airs de poseur. Yeurk. Elle mâchouilla son réglisse en disant à Saiko:

-Son casque de salamandre séché me donne la gerbe.
-Hihi! Mai, tu n'es pas gentille! Pas étonnant que tu n'ai pas encore de petit copain malgré ton rang de Lovely girl, tu es jolie mais si difficile.

Mai ne releva pas la pointe de jalousie qui restait cachée mais cependant bien audible derrière la voix doucereuse de la jeune fille. Elle n'était pas vraiment difficile...enfin si peut être. Mais lorsque ces goûts correspondaient miraculeusement en un être de chair autre que de sucre, il était soit horrifié par ses manières, soit trop occupé par son travail.

Oui, Maika ne l’avouera jamais à personne, mais elle avait un petit faible pour les intellect's. Ils l'impressionnaient par le nombres de connaissance qu'ils emmagasinaient et recrachaient parfaitement. Malheureusement, ce n'était pas vraiment réciproque, alors elle compensait avec les sucreries, ses meilleures alliées dans les coups durs. De toute façon, ses goûts et envies changeaient aussi au fil du temps. Il y a un mois, elle se pâmait d'amour pour un Darky, un de ces concasseurs de cacao . Hum, en parlant de chocolat et bonbons, elle n'avait plus d'argent pour en acheter. Tout son pognon du mois était passé dans l'achat de ses instruments de musiques. Elle fouilla dans sa sacoche d'un air de plus en plus désespéré. Seigneur, non, il ne restait que 10 chupa-chups, 4 petits paquets de fraise tagadas, 3 mentos, 2 barres de chocolat presque fondue. Elle ne tiendrait jamais le weekend avec ces simples rations de survie!

Elle supplia Saiko de l'avancer avec un peu de monnaie ,mais celle-ci lui répondit,sans aucune pitié :

-Ah non, je n'ai pas d'argent en ce moment désolée. Mais si tu vas au gymnase, tu y trouveras peut être ton bonheur. D'autres goinfres dans ton genre font des paris de bonbons. C'est craignos comme occupation tu ne trouves pas?

Moi, c'est toi que je trouve craignos, espèce de sac à patate.

Et sans répliquer, elle abandonna la jeune fille pour courir en direction du gymnase. L'appel du sucre était vital, important, incontrôlable. Elle débarqua en pleine partie de carte, se jeta sur la petite bande de fille en les suppliant de la laisser jouer. Elle apprit rapidement les règles du jeu, mais perdit un chupa-chup dès le premier tour. C'est en voyant la fille en face d'elle dévorer SA sucette à la fraise qu'elle comprit que pour gagner, il faudrait user de TOUS les moyens.

Maika était une professionnel dans l'art d'arnaquer les gens. Vous croyiez quoi? Quand on vivait la moitié de sa vie dans la rue, on ne se nourrissait pas seulement de miel d'eau fraîche et de verdure hein...quoique la verdure...
Elle subtilisa deux cartes, qu'elle cacha dans sa manche, puis elle échangea les cartes qu'elle avait en fonction de ses besoins. Elle rafla la mise. Du monde s'attroupait autour d'elles, tant mieux, encore plus de victimes à détrousser. Son petit coté sombre resurgissait à mesure que les bonbons se retrouvaient dans son territoire. Elle ne faisait de cadeaux à personne, si bien que la Musican à qui elle avait prit 12 carambars revint avec la cavalerie.

Un garçon à la démarche typique des Popular , blond et bien sapé. Pas trop laid, une ribambelle de bout de fer accroché aux oreilles. Maika se demanda un fugitif instant si le mec ne voulait pas non plus se percer le nez. Avec un bel anneau en or dans les naseaux, il aurait été la mascotte d'un éclatant élevage de bovin.
Hum...Le garçon voulait briller aux yeux de sa belle? Il sera agréablement surprit. Il la regarda avec un sourire sans-innocence:

- T'as pas de chance, je suis accro aux bonbons et j'en ai plus beaucoup en ce moment. Je vais gagner.

Tiens donc, un sucraddict? En d'autres circonstances, Maika lui aurait bien partagé sa cagnotte et lui aurait certainement demandé d’être son ami. Mais à ce stade de la partie, elle ne se sentait absolument pas d'humeur câline. Une chienne enragée qui protégerais sa part de steak, sa mise de bonbecs en l’occurrence, voilà l'image qu'on pouvait se faire d'elle en ce moment.

La future victime lui expliqua les règles du jeu, comme si ce n'était pas à ça qu'elle jouait depuis 3 heures. Il la prenait pour une attardée débarquant de l’île Sukiyaki ou quoi? Puis la partie commença et Maika prépara le terrain habilement pour sa victoire...

- Au fait, je m'appelle Lucas. Tu as peut-être déjà entendu mon nom circuler dans le pensionnat ...

Oho, la chance lui souriait, elle avait deux cartes correspondants dans sa manche en plus de celle tirée, ce qui lui faisait 4 paires, mais autant en garder une dans sa manche. Lucas? Drôle de nom pour un veau...argh non c'est un humain, un humain. Mais ces anneaux...

-J'ai 3 paires aussi, ton petit nom ne me dit rien si ce n'est qu'il est le même que celui de mon boulanger français préféré. Moi, c'est Mai. Tu as peut être entendu mon nom circuler dans toutes les boites de céréales du campus.

Elle lui tira la langue puis lança un regard à sa montagne de bonbon .Enfin, elle retourna un sourire carnassier à sa future victime:

-Augmentons les enchères petite proie. Je commençais à m'ennuyer ferme avec toutes ces fillettes, mais toi tu seras assez costaud pour supporter le massacre n'est-ce pas? Une partie en trois manche en comptant celle-là. Le gagnant remporte la mise, et le perdant se fait massacrer par le gagnant.

Oui, elle allait jouer un peu avec le beau Popular avant de le rendre déconfit à sa petite chérie. Elle se sentait d'humeur machiavélique, heureusement que ses amies n'étaient pas là pour voir cette Mai aussi diabolique.

En attendant que la demoiselle joue, il se présenta. Lucas. Pas la peine d'y ajouter son nom de famille. Peu de personnes du pensionnat étaient françaises, mais il ne voulait pas que ces rares individus le regardent de travers ou se moquent de lui, parce qu'il ne le supporterait pas. Non mais Dellanoy quoi ...
Le petit sourire charmeur qu'il adressa à son adversaire fit glousser les filles dans le public, ce qui lui fit grandement plaisir. Il en regarda quelques-unes, cherchant ses prochaines proies. Pas pour le jeu, du moins, pas pour celui-là ...

La Lovely - car il en était sûre, elle avait trop d'airs de Lovely pour ne pas en être une - tira sa carte et regarda son jeu. Elle aussi avait trois paires. Lucas, le prénom de son boulanger FRANCAIS préféré ? Vive les coïncidences ... Alors, elle, elle s'appellait Mai ? Drôle de nom. On aurait plutôt dit un surnom, mais bon, lui, il n'y connaissait rien aux prénoms japonais. Hum, drôle avec ça. Mais lui, il ne mangeait pas de céréales. Le Popular était un grand habitué du café, et il se trouvait trop âgé pour encore manger des céréales. Ce qui était relativement stupide, puisqu'il se battait pour des bonbons et que des adultes très respectables mangent encore des céréales.

Mai tira la langue à Lucas, ce qui eut pour seul effet de faire apparaître un sourire sarcastique sur son beau visage. Elle regarda tout les bonbons qu'elle avait amassé, le regard bleu du jeune homme se dirigeant dans la même direction. Dieu comme le nombre de sucreries était grand. Elle avait battu tout les gens de la salle ou quoi ? Puis elle se tourna à nouveau vers lui, avec un sourire ressemblant au sien. Un pari, un combat.

- Très bien. Mais qu'est-ce que tu entend par « massacrer » concrètement ?

Oui, le Popular était concret, et il pensait bien qu'elle n'allait pas s'amuser à le frapper. Déjà parce que, même si c'était une fille, Lucas n'hésiterait pas une seule seconde à lui rendre ses coups, et puis, il y avait tellement de façons plus amusantes de détruire les gens ... Ce fut sur cette pensée ô combien cruelle qu'il tira une nouvelle carte. La chance revenait vers lui, il avait une paire de plus. Sur les trois paires qu'il avait déjà posées sur la table au tour précédent, il rajouta celle-ci. L'important surtout était de garder constamment deux cartes cachées, pour ne pas que le nombre de cartes le trahisse, qu'il doive être pair ou impair, ou que le nombre de cartes soit simplement trop important.

- Tu es bien une Lovely Girl, hum ?

C'était une question, seulement à moitié. Il en était presque sûr, mais presque n'étant pas totalement, il lui semblait préférable de ne pas se tromper sur les gens. Après tout, elle pouvait bien être une simple Musican's un peu excentrique, ou une Community'Talented. Mais sa passion pour les bonbons l'empêchait de savoir véritablement. Il savait que la plupart des filles du couloir qu'il fréquentait faisait excessivement attention à ce qu'elles mangeaient. Il laissa ça de côté. Il n'avait plus que trois cartes en main plus les deux cachées dans ses manches, et Mai en avait quatre. Si le prochain tour lui offrait une bonne carte, il était presque sûr de gagner.

- Tu n'as pas peur de perdre tout ces bonbons ? Personnellement, il y a des moments où je sais que je devrai arrêter pour ne pas perdre tout ce que j'ai accumulé ...

C'était faux, bien entendu. Rien de plus qu'une simple tentative d'intimidation. Lucas aimait beaucoup essayer de déstabiliser les gens. Et même si cette fille ne semblait pas être faite de sucre, il était possible qu'elle soit plus fragile qu'elle ne le laissait paraître. Après tout, qui ne tente rien n'a rien !

La partie allait de bon train et Mai s'ouvrit une sucette au litchi. Maika était sûre de son coup, le mec en face d'elle allait perdre. Et il s'en mordra les doigts. Le garçon ne se débarrassait toujours pas de son sourire de Play boy. Une raison de plus pour l'inciter à gagner, et ce par tous les moyens. Le blanc-bec n'avait aucune idée d'en quoi consistait le "massacre". Très bien, elle lui expliquerait à la manière d'une mère à son gamin gâté pourris qui demande comment il doit remonter sa braguette.

Mais déjà, le Beau blond passe à une autre question. Si elle était une Lovely? Il avait une déficience au niveau de ces globes oculaires de petit prince ou quoi? La question ne se posait même pas. Une fille aussi extravertie et sucrée que Mai ne pouvait être qu'une Lovely diantre! Ne voyait-il pas ses manières délicates et fémin...quoiqu'en ce moment l'état de Mai ne fût pas vraiment celui d'une Lovely de pure souche. Elle soupira : chassez l'habitude et il revient au galop. Mais elle haussa les épaules l'air de dire "Pfuit!», le jour où une espèce de sagouin essaierait de la changer, il serait servit. Avec les intérêts.

Elle reporta son attention sur son jeu, elle ne devait surtout pas se déconcentrer. Le blanc-bec avait 3 cartes et elle 4. Il lui restait une paire cachée, au prochain tour, si dieu le veut, elle gagnerait.

Il lui sortit des menaces sous forme de conseil. Comme c'était gentil de sa part, un peu plus d'humilité ne l'étoufferait pas. Maika décida enfin d'ouvrir la bouche, elle retira sa sucette momentanément et dit d'une voix joueuse :

-Question bête, réponse bête. Je peux clairement l'attester, tu es un joli Popular en conserve. En ce qui concerne le "massacre", le perdant doit céder une partie de son corps au gagnant qui se fera un plaisir d'y inscrire, graver, ou faire tout autre chose avec. Toujours partant ?

Maika suça son bonbon quelques minutes en attendant son tour puis rajouta:

-Je n'ai pas peur perdre tous mes lots avec toi. Car je sais qu'un jour je les récupérerais, que ce soit dans un coin sombre ou en public. Si tu me choures ne serait ce qu'un seul carré de chocolat, je te casse ta jolie petite bouille d'angelot...

Elle s'interrompit, oh seigneur, mais que disait-elle encore?? Mai la racaille c'est du passé enfin! Elle aurait du s'inscrire chez les Darky avec un tel caractère de sanglier sans cervelle. Elle se reprit:

-Enfin, c'est ce qu'aurait dit mon frère s'il était là. Un vrai petit sucrier en pétard ahaha...

Elle voulait se tuer, mais pourquoi avait-elle menti??? Elle aurait due laisser la menace s'inscrire dans les plus profondes cellules de son adversaire. Quelque chose n'allait pas. Et ça la tracassait.
Arrive son tour de piocher, petit bouddha au miel était avec elle. Elle posa les deux paires, et reprit son sourire de prédateur:

-Il ne me reste qu'une carte. Finalement, 3 parties c'est peut être un peu trop. On règle celle-là une bonne fois pour toute. C'est quitte ou double. On termine les festivités, et je te laisse retourner dans ton monde de strass et de paillettes. Ta chérie doit s'impatienter.

En effet, les filles agglutinées autour des deux duellistes gloussaient à chaque sourire du tombeur et cela commençait sérieusement à lui mettre les nerfs en boule de papier mâché.
Ne pouvaient-elles pas aller glouglouter ailleurs??

Alors, ça consistait en ça, le massacre. Laisser une partie de son corps à l'adversaire, qui se ferait un plaisir d'en faire ce qu'il voulait ... Tout un scénario d'idées pas très catholiques, voire complètement perverses, lui passèrent par la tête. Puis il jeta un regard à Maika qui le regardait avec un air stupide. Bouh, non, jamais de la vie. Lucas réprima un frisson d'horreur. Ce n'était pas avec cette soi-disant Lovely qu'il tenterait quoi que ce soit.

Après quelques minutes, elle répondit enfin à son insinuation par une menace. Et ça se prétendait Lovely, ça ? Bah bonjour la réputation du Paradis Drogué ... Puis elle se reprit, disant que c'était ce que son frère aurait pu dire. Lucas esquissa une moue dubitative, mais ne dit rien, se contentant de se se concenter sur le jeu. Cela dit, Mai devenait un peu plus intéressante. Entre le massacre et les menaces ...

C'était au tour de Lucas. Le français tira une nouvelle carte et ... se rendit compte qu'elle ne lui servait à rien. A rien du tout. Il réprima un grognement mais ne put s'empêcher de grimacer. Il n'allait tout de même pas ... perdre ? Il n'allait pas perdre face à cette fille accro aux bonbons ! C'était impossible. Seigneur Dieu, pourquoi être si cruel ? En attendant, il se retrouvait avec le même nombre de cartes que Mai, sauf qu'elle n'avait pas encore joué ... L'inquiétude de se retrouver "massacré" traversa soudainement l'esprit du blondinet.

- Mai, tu massacres souvent des gens ?

Un soupçon de crainte dans sa voix d'habitude si assuré. Ca ne lui ressemblait pas, mais Lucas détestait être battu, que ce soit aux cartes ou à tout autre chose. Et il n'aimait pas non les gravures sur la peau. Surtout que la plupart du temps, ça ne partait pas. Pourquoi avait-il accepté le massacre, déjà ? Ah, oui. Parce qu'il était sûr de gagner. Mais la fin de ses 174 victoires consécutives semblait être annoncée. Il allait être battu. Si il avait été dans un manga, il savait qu'une grosse goutte aurait été dessiné sur son front. Pas cool.

Ce fut au tour de la fille aux cheveux verts de jouer. Elle piocha une carte et ... posa deux paires. La fin était proche ! Pour le français, c'était l'Apocalypse. Si jamais il perdait, son honneur serait perdu, il deviendrait la risée des joueurs du gymnase, et il ne pourrait plus jamais être vu ici à moins de vouloir être humilié. La déchéance. Comment allait-il s'en sortir ?

Mai décida de changer les règles. Non, elle ne pouvait pas dire qu'on s'arrêtait au bout de cette partie ! C'était trop facile. Peut-être qu'elle avait peur. Mais oui, c'était ça, sinon elle n'aurait pas fait cette proposition, puisqu'elle aurait été sûre de gagner. Cela rassura un peu Lucas. Son raisonnement était indiscutable. Il tilta sur la phrase "Ta chérie doit s'impatienter."

- Bah, t'inquiète, Haya traîne pas ...

Oh, il se rappelait d'Haya, maintenant ! C'était une jolie poupée, avec de longues boucles noires et de grands yeux verts en amande. Celle qu'il avait largué la semaine dernière, prétextant qu'elle le collait trop. Ce qui n'était pas faux, mais la vérité, c'est qu'après s'être amusée avec elle, il l'avait juste laissé tomber.

- Non, laisse, j'ai pas de copine en ce moment.

Il n'aurait pas dû dire ça. Il se retrouva littéralement plaqué au sol par toute une foule de filles en furie. Gloups. Si il avait été dans un dessin animé, on aurait juste vu son bras qui dépassait du tas, comme quémandant de l'aide. Mais il resta calme.

- Hum, on verra ça après les filles. Laissez-moi terminer ma partie, s'il vous plait.

Elles se relevèrent, à regret, mais les yeux pleins d'espoir. Il frissonna. Les filles faisaient vraiment peur, des fois ! Il lança un regard à la fille aux cheveux verts, se sentant gêné, tout à coup. Bizarre. Il reporta son attention sur le jeu, piochant à son tour. C'était la fin. Mai avait gagné. Il avait cinq cartes inutilisables dans les mains. Plus les deux cachées dans ses manches. Sept cartes et aucune paire. C'était vraiment la loose.

- Bon, je crois que tu vas gagner ...

Et franchement, ça lui écorchait la bouche de dire ça. Cette fille mettait fin à sa série de victoire ! Et c'était vraiment quelque chose de dur à accepter. Et le pire, c'était qu'elle remontait dans son estime à cause de ça. C'était vraiment le monde à l'envers.

Mai jubilait, elle adorait ce sentiment d’extrême satisfaction de voir son adversaire en telle mauvaise posture. Mauvaise posture que la noisette avait immédiatement confirmée en lui demandant d’un air très inquiet si Mai massacrait souvent les gens. Mais en y réfléchissant bien, Mai ne massacrait jamais personne à ce jeu. Hormis la noisette française, il n’y avait que Charlotte qui insérait le massacre dans ses parties de cartes. Mai n’avait d’ailleurs jamais gagné contre elle, ses cicatrices au derrière pouvaient en témoigner mais ce secret d’Etat ne serait jamais dévoilé. De toute façon, avec qui aurait-elle pu parler de ses fesses hein ?!

Le Popular interrompit ses pensées douteuses en lui indiquant qu’il était célibataire. Ce mot magique eut le don de faire sortir toutes les filles de leur transe adoratrice. Elles se jetèrent sur son adversaire comme des chiens affamés se jetteront sur une minuscule part de steak. Cette comparaison était tout à fait appropriée, De la noisette n’était qu’un bout de viande fraiche mise à la disposition des louves. Rien de plus. Cependant, Mai sentit un petit tiraillement au niveau de la poitrine. Couvait-elle une petite maladie?

Lorsqu’il se releva en demandant quelques instants de répits aux groupies, il lança vers Mai un regard gêné. Pourquoi se sentait-il gêné ? Ce n’était pas de sa faute si Dame Nature l’avait doté d’un aimant à Poulette, cela prolongeait simplement la partie. Mais le temps arrivera bien un jour où Mai poserait son dernier double. Elle piocha la carte gagnante et lança un dernier sourire annonçant son triomphe. D’ailleurs sa proie connaissait déjà le verdict, oui, il savait lui aussi que Mai gagnerait. Elle attendit encore quelques secondes pour savourer pleinement le regard de chien battu qu’arborait le français, lui procurant une sauvage satisfaction. Puis une fille à coté d’elle soupira bruyamment :

-Bon dépêche-toi de poser ta carte la cruche, de toute façon, on te laissera jamais toucher à NOTRE Lulu. T’as pas bientôt fini de te l’accaparer ?!

Des murmures d’approbation s’élevaient de plus en plus fort, puis Mai vit soudain plusieurs regards envieux et mécontents braqués sur elle. Comment la situation avait-elle bien pu tourner en la faveur du perdant ?! Quelle injustice ! En plus,elle n’avait aucune envie de se l’accaparer leur morceau de viande. Et puis comment ça « cruche » ? La sale tête de thon qui lui avait dit ça allait le regretter amèrement. Elle tapa du poing sur la table pour arrêter les mégères et se leva brusquement. Silence se fit dans l’assemblée, elle n’était absolument pas d’humeur à rembarrer toute ces nanas une par une.

Elle allait faire regretter à toutes ces mégères de l’avoir fait sortir de ses gonds. Son regard parcouru l’assemblée pour aller se ficher droit sur le Blond, parfait. Sans prévenir, elle empoigna le Popular et prit ses jambes à son cou. Le temps que l’information passe au cerveau et que les filles se mettent à leur poursuite, Mai était déjà loin avec son butin et son otage. Le gymnase était plutôt vaste, et les profs de sports étaient tous reclus dans les bureaux, tant mieux. Elle balança sans ménagement De la noix de Pécan sur les tapis servant à la lutte et ferma immédiatement à clé la remise. Des rugissements lui parvinrent ainsi que des menaces en l’air. Sans plus y faire attention elle regarda le nouveau lieu, des caisses remplies de ballons, des tapis de lutte, des cerceaux et pleins d’autres choses utiles au sport.

-Ne me remercie pas surtout pour t’avoir permit d’échapper à ton destin de steak-frite, dit-elle au jeune garçon, elles sont tenace dis-donc, je crois qu’on est bon pour rester ici une heure ou la soirée tout au plus si tes midinettes ne lâchent pas la grappe.

Elle se servit un carambar dans son paquet et en lança un à son compagnon d’infortune. Autant commencer le dialogue de façon amicale, après tout elle avait eu ce qu’elle voulait : se venger des groupies pour l’avoir insulté en emportant leur objet de convoitise. Elle avait de quoi tenir question bouffe, tout roulait parfaitement bien. Restait maintenant à voir la réaction de Lucasse-noisette.

Lucas savait déjà que Maika allait gagner. Il était dégoûté, triste, en rage, abattu. Et il voyait clairement que la Lovely prenait son temps pour l'achever. Et cela n'échappa pas non plus à l'une des filles qui assistait à ce combat féroce de félins sauvages. Elle c'était pas un félin sauvage. C'était même pas un petit chat mignon. C'était ... un poisson. Une petite chose inutile qui ne pouvait pas nourrir des lions tels qu'eux.

Son ton ne plus absolument pas au français. De quel droit parlait-elle ainsi à sa meilleure adversaire, à la seule qui l'ait jamais vaincue ? Et ... attendez, quoi ? LULU ? LULU ?! Mais où elle avait été cherché ce surnom pourri ? Personne ne l'appellait Lulu ! Personne ! A part sa chère maman, bien sûr. Ah, sa mère, qu'elle était belle et intelligente et totalement supérieure à toutes les pauvres filles de ce pensionnat ! Des murmures s'élevant dans la salle tirèrent Lucas de ses pensées. Et vu les têtes des filles de l'assistance, il avait plutôt intérêt à prendre la poudre d'escampette, et vite ! Il jeta un regard à Maika. Elle tapa du poing sur la table, et les filles se turent aussitôt.

Arrêt sur image. Faisons le point. Une jolie demoiselle vient de gagner aux cartes contre l'un des garçons les plus populaires de l'école. L'assistance, le public, ou qu'importe le nom que vous lui donnerez, est composé à 90% de filles adulant le jeune garçon. Aussi sont-elles très en colère contre la Lovely. Dans leurs yeux, on sent de la tension, de la haine, et aussi une jalousie certaine de voir que le Français lui accorde autant d'attention. Mais, rebelle dans l'âme, la demoiselle ne se laisse pas faire et ...

Elle se leva et attrapa le bras de Lucas avant de s'enfuir à toutes jambes. Le temps que les autres filles comprennent, ils étaient déjà enfermés dans la remise. Lucas avait les yeux écarquillés, tentant de comprendre un peu ce qu'il s'était passé. Il secoua la tête, pendant que Maika lui disait de ne pas la remercier, surtout. Puis elle ajouta qu'elles étaient tenaces. Elle lui lança un carambar, qu'il déballa en soupirant.

- Je sais bien. Une fois, je me suis enfermé dans ma chambre parce que dès que je sortais, une fille ou deux me sautaient dessus. Et je te raconte pas le jour de mon anniversaire ... Des fois, je préférerais presque être laid et inintéressant ! Enfin bref ... Merci, je crois que tu m'as sauvé la vie !

Il enfourna le carambar dans sa bouche, pensif. Il jeta un regard à Maika. Il devait bien reconnaître qu'il lui devait beaucoup sur ce coup-là. Il savait bien qu'elle avait fait ça simplement pour se venger du poisson qui l'avait insulté, mais si elle n'avait pas attrapé le Popular par le bras, il serait certainement encore en train d'être entourée des filles qui frappaient à la porte avec rage. Si ça continuait, elle allait rameuter les profs et les surveillants ! Lucas grogna et s'approcha de la porte.

- Allez-vous en ! Laissez-moi tranquille !

Les coups s'arrêtèrent un instant. Avant de reprendre de plus belles, avec des cris déchirants - enfin, c'était ainsi qu'ils paraissaient, mais cela ne faisait ni chaud ni froid à Lucas.

- Oh mon Dieu, mais qu'est-ce qu'elle te fait pour que tu dises ça ?
- Tu ne nous aimes plus ?
- Qu'est-ce qu'elle a de mieux que nous ?
- Elle te force à dire ça, pas vrai ?
- Mais taisez-vous, j'en ai assez ! Partez, partez, partez !

Le silence s'installa. Il jeta un regard à Maika, toujours en train de savourer son carambar. Il entendit des pas, et espéra très fort que c'était parce que le troupeau partait. Il soupira, puis finit son bonbon.

- Et des fois, elles insistent encore plus.

Il se leva, jetant un regard à ses bottes blanches. Elles étaient encore dans un bon état, ce qui signifiait que rien n'était salissant dans le coin. Il se laissa tomber sur un des gros matelas, comme il les appelait, qu'on utilisait pour le saut en hauteur ou pour la gym. Il pensa un moment à ce que diraient les autres s'ils le voyaient relâchés comme ça, sans aucun souci de ce à quoi il pouvait bien ressembler. L'avis de Maika ne l'intéressant pas grandement, il pensait pouvoir se permettre ce genre d'attitude.

- Pourquoi tu m'as sauvé ? C'était vraiment une simple vengeance ?

Après avoir posé sa question, il rougit soudainement. Bien sûr que c'était une simple vengeance, quoi d'autre ? Enfin, ça n'avait pas d'importance de toutes façons.

- En tout cas, tu as gagné, alors bon, je suppose que je dois accepter le massacre.

Maika remerciait du fond du cœur sa tutrice pour lui avoir permit de s’inscrire dans ce pensionnat, on ne s’y ennuyait jamais et les friandises lui arrivaient dans le bec si besoin. Cependant, elle aurait préférée savourer ses sucreries ailleurs et surtout avec quelqu’un d’autre. Mais Ma chère Maika, on ne pouvait pas tout avoir dans la vie. Oui, oh combien elle savait cela…
Mais le tapage que faisaient les groupies commençait à devenir de plus en plus agaçant. Et quand La noix de Pécan lui raconta ses mésaventures avec les filles, Mai ne put s’empêcher de compatir, un tout petit peu. Mais quand il souhaita devenir laid, Mai ricana. C’est sur que sans sa beauté, ce blond n’était rien. Mais ce n’était pas sa faute, c’est son destin qui a voulut qu’il devienne un homme à femme. Et cela Mai n’y pouvait rien, de toute façon elle ne voulait rien faire pour lui.

Lorsque les insultes et les menaces d’envoyer les profs fusèrent, le français se leva immédiatement et les supplia de le laisser tranquille. Oui c’est bien petit, ruine donc ta réputation auprès de tous ces thons. Mai croquait dans un nouveau carambar en assistant aux premières loges à la défection de ce Populare. Aha, la popularité lui flanque les guibolles en fromage blanc on dirait bien.

Quand les hurlements des pauvres petites midinettes s’arrêtèrent enfin, il revint s’installer confortablement, l’air pénard, à l’aise dans ses shoes. Où donc était passé le petit propre sur lui-même qui s’observait toujours dans les yeux des filles pour voir si aucunes mèches ne dépassait ? Comme quoi les apparences étaient vraiment trompeuses, mais elle ne voudra pas pour autant le connaitre plus que maintenant. Puis il lui demanda :

- Pourquoi tu m'as sauvé ? C'était vraiment une simple vengeance ?

Aie, Maika aurait préférée ne pas y répondre. En fait, elle ne savait pas elle-même non plus pourquoi elle avait fait ça. Normalement, voir Delanoisette se faire ensevelir par une masse de baiser et des déclarations d’amour intempestives aurait du lui procurer un plaisir sadique mais étrangement…Bah, elle ne se sentait peut être plus d’humeur à jouer. Et puis elle voulait simplement se venger de ces asperges qui l’avaient insulté, oui c’était ça. Le français la rappela à la réalité :

- En tout cas, tu as gagné, alors bon, je suppose que je dois accepter le massacre.

Oh oui, réfléchir sur ça était nettement plus intéressant que ses réflexions sur le pourquoi du comment elle était devenue une justicière sucrée. N’empêche qu’ils n’avaient pas terminé leur partie, du coup le Popular aurait pu tout simplement faire comme s’il ne s’était rien passé, et pourtant…Une toute petite voix au fond d’elle lui dit qu’au fond, Mai admirait l'intégrité du beau blond. Petite voix qu’elle s’empressa de réduire au silence. Non mais.
Maika se leva en disant d’un air indifférent :

-Je ne t’ai pas vraiment sauvé, je t’ai juste enlevé à ces vaches à lait. Tu as raison c’était une simple vengeance.

Pourquoi Mai avait l’impression de lui mentir ? Bizarre…pourtant c’était la stricte vérité… oh et puis zut. Mai chassa cette pensée et se rapprocha du beau blond :

-Est-ce que tous les français sont aussi honnêtes que toi ? Cette histoire m’étais complètement sortie de la tête. Voyons voir…

Maika le dévora du regard, à l’affut du moindre bout de peau qui pourrait être intéressant à torturer, viander, cicatriser, scarifier et toutes sortes de festivités. Puis elle posa un doigt sur sa main et remonta progressivement le long de son bras. Le français avait la peau crémeuse et douce, dommage qu’il ne soit pas un gros gâteau, Mai l’aurait dévoré.
Elle passa un doigt expert sur son visage. Il faudrait qu’elle choisisse une partie visible, ainsi tout le monde saura que La noix de Pécan s’est fait humilié par Maika Shizuka. Peut être qu’il ne voudra plus parier des friandises avec elle, tant mieux. Plus il était éloigné d’elle et mieux elle se porterait.

Elle toucha ses joues en se disant qu’avec la bouille qu’il avait, elle était certaine qu’il arriverait à reconquérir d’autres filles. Pfff ,pas homme à femme, steak à caniche-nain plutôt.
Puis son doigt arriva au niveau des lèvres et le cerveau de Maika…beuga. Elle se demanda combien de filles avaient eu la malchance de gouter à ce fruit amer. Il devait surement baver en embrassant, c’était sur. C’était doux au toucher en plus comme de la soie ou… Au bout d’une fraction de seconde Mai se rendit compte qu’elle était en train de caresser la bouche du blond et qu’il l’a regardait d’un air…surpris ? Dégouté ? Aucune idée. Mai rougis violemment, lui pinça le nez et s’éloigna en disant :

-Pfff, aucune partie ne m’intéresse…et si je coupais tes cheveux et y collait un chewing-gum ?

Mai colla ses pouces et ses index de façon à encadrer le visage de Lanoisette en se reculant. Mais quelque chose par terre la fit trébucher sur le placard derrière elle. Le placard tanga dangereusement d’avant en arrière et commença à tomber sur Maika.
Bof, elle s’en sortira, c’est sur. Mais ça allait lui faire sacrément mal.

Si un jour on avait dit à Lucas qu'il allait sauver une fille qui lui avait piqué ses bonbons précédemment, il ne l'aurait jamais cru. Mais comme c'est un peu plus compliqué que ça, il vous faudra relire le rp si vous ne vous en rappelez plus. Flemme de faire un résumé. Bref.

Lucas s'était installé tranquillou sur un des gros matelas de sport, regardant le plafond en mâchouillant le carambar que lui avait passé Maika. Et il ne trouva rien de plus intelligent à faire que de lui poser une des questions qui trottaient dans sa tête, à savoir « Pourquoi m'avoir sauvé ? » et à lui rappeler qu'elle avait un massacre à faire. La demoiselle répondit d'un ton neutre qu'elle ne l'avait pas vraiment sauvé mais enlevé. Bah, pour lui, le résultat était le même : il n'avait pas à se coltiner les ¾ des filles du pensionnat, et ça c'était cool. Maika se leva et s'approcha de lui. Elle lui posa une question d'honnêteté, disant qu'elle avait oublié.

- Tu sais, c'est comme partout, y a des gens qui sont honnêtes et d'autres non. Je fais juste partie de la première catégorie.

Il avait fermé les yeux et parlé d'un ton suffisant. Il sentit alors la main de Maika sur la sienne et il ouvrit les yeux, étonné. Lucas se retint de frissonner lorsque le doigt de la fille aux cheveux verts glissa le long de son bras. Un frisson ? La peur sûrement, de voir son bras mutilé. Pareil pour son cœur qui semblait s'emballer légèrement. Un peu de panique, rien de plus. Rien d'autre.
Il se redressa et elle alla trimbaler son doigt sur son beau visage. Sa main sentait les sucreries. Elle prenait son temps, touchant chaque partie de son visage. S'arrêta sur ses lèvres. Elle eut l'air de penser, ne se rendit certainement pas compte qu'elle était en train de caresser la bouche du blond. Il en fut surpris. Son cœur s'affola à nouveau. Et au moment où il allait détourner la tête pour rougir, elle sembla se « réveiller » et ce fut elle qui devint rouge pivoine. Elle lui pinça le nez et se recula. Lucas avait porté une main à son nez sous la douleur.

- Nan mais t'es malade ? T'as des problèmes ma pauvre !

Et ce qu'elle dit ensuite lui confirma cette idée. Nan mais franchement. Il lui lança un regard hautain, et en une fraction de seconde, se retrouva à soutenir l'armoire qui avait failli atterrir sur Maika.
Elle avait trébuché sur un tas de bâton de relais, et s'était cogné contre l'armoire qui avait basculé. Lucas n'avait pas pris le temps de réfléchir et s'était jeté contre le meuble. Mais c'est que c'était lourd en plus !

- Vire de là, je peux pas tenir l'armoire pour l'éternité !

Il essaya de la faire se redresser, mais elle était trop lourde pour lui. Il dû faire un effort surhumain pour la repousser enfin. Il remarqua alors Maika à côté de lui. Il s'adossa contre l'armoire, un air de beau-gosse au visage.

- Heureusement que j'étais là pour te secourir. Puis, un œil ouvert, tourné vers elle et plus sérieux : Tu pourrais me dire merci au moins, ça t'écorcherait pas la bouche nan ?

Enfin, il parlait à une Lovely, il ne devait pas l'oublier. Et si elles étaient toutes aussi superficielles que Mitsuko, y avait des chances qu'il ne reçoive jamais le moindre remerciement. Il haussa les épaules et retourna s'asseoir sur le matelas, avant de se souvenir qu'elle avait dit elle aussi quelque chose du genre un peu plus tôt.

- Ah, et maintenant que j'y pense, je suis censé te remercier aussi pour tout à l'heure, alors : Merci.

Il aimait bien donner l'exemple. Il trouvait ça marrant. Elle ne devait pas espérer, cependant, qu'il la remercierait si jamais il n'attendait pas de remerciements en échange. Lucas, il fonctionnait un peu en mode donnant-donnant. Parce qu'on perd moins de chose quand on attend un retour des autres …

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